Double exposition de Yom de Saint Phalle, l’une au Musée de la Légion étrangère et l’autre au Centre d’Art Contemporain Les Pénitents Noirs à Aubagne.
Né à Paris en juillet 1970, Yom de Saint Phalle, s’intéresse au modelage et à la peinture dès son plus jeune âge. En 1994, il s’engage dans la Légion étrangère jusqu’en 2001 puis il se consacre à l’art et rejoint ainsi sa tante Niki de Saint Phalle en Californie. Il séjourne un an auprès d’elle, et commence la sculpture comme soudeur, puis comme mosaïste, avant de s’intéresser aux matériaux composites. A la mort de la plasticienne en 2002, il poursuit sa formation auprès de Raymond Hains à Paris, jusqu’en 2005.
Ces deux expositions sont donc l’occasion pour l’artiste de revenir sur son travail, en rendant hommage à l’institution de la Légion étrangère et aux personnes qui l’ont formé, et l’ont aidé à trouver sa voie artistique.
Au musée de la Légion étrangère, les œuvres de Yom de Saint Phalle seront présentées par type de matière dans un parcours sobre et épuré mettant en avant l’évidence évidente de ces formes étonnantes. Le public contemplera le travail de différents matériaux : métal, bois, pierre, fibre de verre, porcelaine ou encore mosaïque de verre. L’exposition illustre la devise More Majorum, à la manière des anciens, devise régimentaire partagée par les deux unités dans lesquelles l’artiste a servi, le 2e Régiment étranger de parachutiste et la 13e Demi-brigade de la Légion étrangère.
Au Centre d’Art Contemporain Les Pénitents Noirs, l’œuvre de l’artiste sera présentée dans sa globalité, de la méthode à la création. On retrouvera ses dessins, ses photos, ses esquisses, ses travaux à plat puis le résultat final avec ses sculptures en 3D. Le sculpteur insiste sur la nécessité de percevoir l’œuvre en 2D avant de découvrir la sculpture finale. Seront également exposés ses projets de design et d’architecture.
« L’évidence évidente » tente de révéler un nouvel espace fait de lumière, en creusant successivement la matière en hauteur, en largeur et en profondeur, ce qui confère aux sculptures des propriétés artistiques nouvelles. C’est aussi un concept artistique où, comme en philosophie, il s’agit de concevoir une réponse pratique à un problème concret issu du réel. Comment transcrire plastiquement la vie, son essence la plus haute, de manière juste et complète ? S’agissant ici de métaphore plastique, je perce la matière dans les trois dimensions, ce qui révèle à l’intersection des trois axes un nouvel espace (une quatrième dimension), dont on constate qu’il est fait de lumière. » Yom de Saint Phalle
Questions à Yom de Saint Phalle, propos recueillis par Amaru Lozano Ocampo
Amaru Lozano Ocampo
: Qui sont les artistes figurant dans ton panthéon personnel ?
Yom de Saint Phalle : Il y a des sculpteurs qui m’ont inspiré pour des raisons plastiques et d’autres pour leur démarche d’esprit. Avec Tinguely ou Niki par exemple c’est spirituel… Mais je n’ai jamais eu envie de faire des sculptures « à la » Tinguely. Ceux qui m’ont inspiré plastiquement ce sont plutôt Cardenas, Brancusi, Guzman, Barbara Hepworth… La sculpture selon moi est intéressante quand elle est sensuelle. C’est un art où la main doit prendre le relais des yeux et des oreilles. Il faut que ce soit plaisant à travailler. Même si c’est une forme géométrique, à un moment il faut qu’il y ait un mouvement possible de la main. S’il n’y a pas ce mouvement de la main il n’y a pas de musicalité de l’esprit, alors ça ne danse pas et c’est mort. Et si c’est mort ce n’est pas la peine de le faire car le but en art consiste à transcrire le vivant, à exprimer la vie.
Amaru Lozano Ocampo : Quelle est la métaphore plastique que tu convoques pour parler de cette connexion avec le divin dans tes sculptures ?
Yom de Saint Phalle : Tu as vu que mes sculptures sont évidées dans les trois dimensions : hauteur, largeur, longueur… et à l’intersection de ces trois dimensions, au cœur de l’œuvre et de son volume, tu as une nouvelle dimension. C’est une façon de dire que dans l’espace évidé de mes sculptures ce n’est pas que du vide, qu’il y a de la lumière. Par-delà les apparences, par-delà la matière, tout est lumière. On baigne dans le divin sans s’en rendre compte. C’est merveilleux, parce qu’aujourd’hui, la science est en train de commencer à envisager l’esprit comme une réalité physique.
Amaru Lozano Ocampo : Parle nous de la première fois où tu as rencontré ta tante Niki de Saint Phalle ?
Yom de Saint Phalle : Je venais d’arriver à San Diego après la Légion. Elle m’avait invité et s’était exceptionnellement déplacée pour venir me chercher elle-même à l’aéroport. On s’est immédiatement reconnus. Elle n’avait pas de panneau avec écrit « Guillaume » mais on s’est vus, on s’est marrés et on s’est embrassés.
Amaru Lozano Ocampo : En quoi vous ressembliez-vous selon toi ?
Yom de Saint Phalle : On est totalement radicaux et décomplexés sur le plan du débat. On n’ a pas peur de parler de tout et de prendre des positions qui sont les positions du cœur. Sachant que le juste n’est pas au même endroit selon les époques.
Amaru Lozano Ocampo : Niki avait aussi un rapport très sensuel à la matière.
Yom de Saint Phalle : Oui ! Niki avait des mains très abîmées mais incroyablement douces. Elle était très tendre charnellement parlant. Une femme fine, un corps de danseuse.
Amaru Lozano Ocampo : Pourquoi as-tu ressenti ce besoin d’aller la voir ?
Yom de Saint Phalle : C’est une expérience mystique. Je l’avais vue en rêve quand j’étais basé à Djibouti. Deux fois, deux nuits de suite. Je voyais Niki avec son visage de vieille chouette qui me regardait avec ses grands yeux bleus ! Mais ne l’ayant jamais rencontrée je ne l’avais pas reconnue ! L’étrangeté des rêves prémonitoires…
Amaru Lozano Ocampo : Niki a été un guide ?
Yom de Saint Phalle : Bien sûr. C’était une sage-femme, ma sorcière bien aimée.
Amaru Lozano Ocampo : Elle t’a enfanté ?
Yom de Saint Phalle : Oui à sa façon elle a enfanté le sculpteur.
Amaru Lozano Ocampo : La Légion t’a enfanté aussi ?
Yom de Saint Phalle : C’est difficile à dire… Car la Légion n’a pas été pour moi une expérience uniquement positive. Il y a des moments où c’est un truc hiérarchique rigide et pesant… et d’autres où c’est la vie communiste idéale.
Photo : Yom de Saint Phalle – Matissage (ø 60 cm) acier doux, laques PU fluo 6 couleurs, vernis lustré
Yom de Saint Phalle Sculpteur
Musée de la Légion étrangère
Exposition jusqu’au 22 septembre 2019
Chemin de la Thuilière
13400 Aubagne
http://musee.legion-etrangere.com
Centre d’Art Contemporain Les Pénitents Noirs
Exposition jusqu’au 15 juin 2019
Les Aires, chemin de Saint Michel
13400 Aubagne
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