Pourquoi les journalistes ne répondent-ils jamais ? C’est une réalité dont personne n’ose parler dans le monde des RP et on peut comprendre pourquoi. Lettre ouverte par Hannah Oiknine, CEO et Foundatrice de Babbler
Cette lettre s’adresse à toutes celles et ceux qui ont déjà essayé de joindre un journaliste et ont fait face au silence. Elle a été rédigé par Hannah Oiknine, co-fondatrice de Babbler, qui nous apporte son ressenti sur la relation RP/Journalistes. Que je sois à Paris ou à New York, le sujet du faible taux de réponse des journalistes est abordé régulièrement dans les conversations que j’ai avec les pros des RP et les journalistes que je rencontre. Voici ma version des faits sur la question : Avec Internet, la donne a changé. N’importe qui peut se constituer une audience sur le web. Alors qu’auparavant, l’attaché de presse connaissait chacun de ses contacts journalistes et n’envoyait de l’information que si celle-ci était pertinente, aujourd’hui, le process des RP a radicalement évolué vers ce qu’on appelle outre Atlantique le « Spray and Pray ». Il s’agit d’acheter une liste de contacts presse gigantesque et de diffuser massivement le même communiqué de presse à des listes d’emails, plus ou moins qualifiées, tout en priant et en croisant les doigts pour que quelqu’un réponde.
Avec l’essor des médias en ligne : bloggers, vloggers, rédacteurs web, rédacteurs mobile, journalistes papier, radio, web radio, tv… Le précieux carnet d’adresse privilégié qu’entretenaient jadis les « attachés de presse » s’est transformé en dizaines de fichiers xls utilisés pour diffuser massivement des « CP » en « PJ », déshumanisant complètement les relations RP avec ces diffusions massives. Une telle pratique basée sur une gestion quantitative et non qualitative de l’information a engendré un véritable déséquilibre dans la relation entretenue entre journalistes, et RP. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Seulement 3 % des communiqués de presse reçus sont lus*. Pendant que le journaliste est bombardé de 500 communiqués de presse par jour et de 25 appels par minute. Les frustrations s’accumulent de part et d’autre. Les journalistes, nos partenaires de travail quotidiens sont aujourd’hui 40 % à réclamer une évolution des pratiques RP. Les contributeurs, eux, ont besoin de nouveaux contenus, en permanence, en continu.
Pendant que le monde se transforme sous nos yeux, les relations presse, quant à elles, sont lentes à se réinventer et à se tourner vers de nouvelles pratiques ou vers de nouveaux outils. D’ailleurs, à ce sujet, le journal Les Échos a récemment souligné que l’industrie des RP était la « plus lente » à se digitaliser. Aujourd’hui, près de la moitié des journalistes remettent en question les pratiques des RP.
Nous sommes à une croisée des chemins et la transformation numérique est l’opportunité à saisir pour faire bouger les lignes positivement. Certains ont peur que les nouvelles technologies automatisent les RP et les transforment en « robots ». Pour ma part, aucun danger ! Le monde change et les RP doivent changer avec lui. La transformation numérique est un véritable levier d’opportunités pour les professionnels des RP. Leur mode de travail ne va surtout pas s’automatiser !
Réinventons-nous comme d’autres l’ont fait avant. Il est temps de porter un nouveau regard sur le métier des RP. Tirons parti de cette nouvelle ère qui s’ouvre à nous pour créer de nouvelles règles du jeu. Hannah Oiknine, CEO et Fondatrice de Babbler.
* Étude réalisée par l’agence Gootenberg, publiée en avril 2015
Photo : Hannah Oiknine et Sarah Azan – Babbler ©DR