Nos oiseaux se volatilisent à tire-d’aile !

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Oiseaux disparaissent : V. Bretagnolle, CEBC (CNRS/Université de La Rochelle)
Oiseaux disparaissent : V. Bretagnolle, CEBC (CNRS/Université de La Rochelle)

Le printemps 2018 s’annonce silencieux dans les campagnes françaises :  les oiseaux des campagnes françaises disparaissent à une vitesse vertigineuse

La Liste rouge nationale permet de mesurer le degré de menace pesant sur les espèces d’oiseaux recensées sur le territoire métropolitain, pour chacun de leur statut de présence (nicheur, hivernant ou de passage) (Source : UICN). Les derniers résultats de deux études de suivi des oiseaux, l’une menée à une échelle nationale, l’autre plus localement, viennent de sortir. Les chercheurs du Muséum national d’Histoire naturelle et du CNRS arrivent au même constat : les oiseaux des campagnes françaises disparaissent à une vitesse vertigineuse. En moyenne, leurs populations se sont réduites d’un tiers en 15 ans. Au vu de l’accélération des pertes ces deux dernières années, cette tendance est loin de s’infléchir…

On ne prend pas de grands risques en disant que les pratiques agricoles sont bien à l’origine de cette accélération du déclin“, a déclarer à l’AFP Grégoire Loïs, directeur-adjoint de Vigie-Nature, qui dirige le Stoc

Les trois statuts de présence des populations d’oiseaux en France métropolitaine
  • Population nicheuse : population se reproduisant en métropole.
  • Population hivernante : population ne se reproduisant pas en métropole mais qui y séjourne une partie de l’année en hiver.
  • Population de passage : population ne se reproduisant pas en métropole et n’y séjournant pas en hiver, mais qui traverse le pays lors de sa migration. Parmi les oiseaux recensés sur le territoire métropolitain, certaines espèces peuvent présenter des populations distinctes correspondant à deux de ces statuts ou aux trois statuts.

Les relevés effectués en milieu rural mettent en évidence une diminution des populations d’oiseaux vivant en milieu agricole depuis les années 1990. Ce sont 308 espèces d’oiseaux qui se reproduisent sur notre territoire.

Victimes des insecticides néonicotinoïdes

L’intensification des pratiques agricoles et la régression des prairies naturelles ont entraîné le déclin de nombreux oiseaux nicheurs, particulièrement des passereaux. L’Alouette des champs, qui nidifie au sol et qui recherche sa nourriture en fouillant la terre, désormais classée “Quasi menacée”, est emblématique de cette diminution des oiseaux associés aux milieux agricoles. De nombreux passereaux granivores communs, tels que la Linotte mélodieuse, le Bouvreuil pivoine, le Chardonneret élégant ou le Serin cini, présentent un déclin marqué de leur population, lié au net recul des jachères et des chaumes hivernaux dans lesquels ils trouvent leurs ressources alimentaires. D’autres oiseaux sont concernés, comme l’Outarde canepetière, qui a subi une perte de 60 % de ses effectifs en à peine plus de 30 ans et qui se trouve “En danger”, ou la Bécassine des marais, dont la population nicheuse est aujourd’hui réduite à moins de 50 individus et classée “En danger critique”. Et les chiffres montrent que ce déclin s’est encore intensifié en 2016 et 2017. il y a aussi notamment un déclin des espèces spécifiques des villes, comme le moineau domestique. Les  oiseaux des villes qui ne supportent plus la forte proportion du CO2 dans l’atmosphère. Ces disparitions massives sont aussi concomitantes à l’intensification des pratiques agricoles ces 25 dernières années, à la flambée des cours du blé, à la reprise du recours massif au nitrate et à la généralisation des insecticides néonicotinoïdes, ajoutent le CNRS et le Muséum dans leur communiqué.

En 23 ans, toutes les espèces d’oiseaux de plaine ont vu leurs populations fondre : l’alouette perd plus d’un individu sur trois (-35%) ; avec huit individus disparus sur dix, les perdrix sont presque décimées. Ce déclin frappe toutes les espèces d’oiseaux en milieu agricole, aussi bien les espèces dites spécialistes – fréquentant prioritairement ce milieu -, que les espèces dites généralistes – retrouvées dans tous les types d’habitats, agricoles ou non. Or d’après le STOC, les espèces généralistes ne déclinent pas à l’échelle nationale ; la diminution constatée est donc propre au milieu agricole, sans doute en lien avec l’effondrement des insectes.

Ces deux études, menées toutes deux sur une vingtaine d’années et à des échelles spatiales différentes, révèlent l’ampleur du phénomène : le déclin des oiseaux en milieu agricole s’accélère et atteint un niveau proche de la catastrophe écologique. En 2018, de nombreuses régions de plaines céréalières pourraient connaître un printemps silencieux (« Silent spring ») annoncé par l’écologue américaine Rachel Carson il y a 55 ans à propos du tristement célèbre DDT interdit en France depuis plus de 45 ans.

« La situation est catastrophique, se désole Benoît Fontaine, biologiste de la conservation au Centre d’écologie et des sciences de la conservation (Cesco) du Muséum national d’histoire naturelle. Nos campagnes sont en train de devenir de véritables déserts. » « Les populations d’oiseaux s’effondrent littéralement dans les plaines céréalières, et cela concerne toutes les espèces, renchérit Vincent Bretagnolle, écologue au Centre d’études biologiques de Chizé et directeur de la zone atelier « Plaine et val de Sèvre ». Les perdrix se sont presque éteintes de notre zone d’étude… »

Lire : https://lejournal.cnrs.fr/articles/ou-sont-passes-lesoiseaux-des-champs

Photo :  © V. Bretagnolle, CEBC (CNRS/Université de La Rochelle)