Artiste pluridisciplinaire français dont la carrière s’est étendue sur plus de cinquante ans, Dufy fut tout autant peintre que dessinateur, graveur, illustrateur de livres, créateur de tissus, céramiste, créateur de tapisseries et de mobilier, décorateur d’intérieur, décorateur d’espaces publics et décorateur de théâtre français.
Dufy fut un remarquable artiste, tout aussi singulier qu’original de par sa technicité de dessinateur et de coloriste ; ses couleurs étaient le fruit d’une alchimie unique, inégalée et inégalable. Tout son talent a reposé sur le fait que l’ utilisation des couleurs de sa palette générait de la lumière.
Passionné, inventif et créateur, Dufy a beaucoup voyagé, parcourant l’Europe.
C’est au cours de l’un de ses voyages, qu’il séjourne sur la Côte d’azur et y découvre la plus belle luminosité pour y peindre la mer.
L’exposition du Musée des Beaux-Arts de Nice permettra au public de découvrir les peintures réalisées par Dufy à cette époque, lors de ses différents séjours et promenades sur la Côte, principalement en 1926, 1927 et 1928 puis en 1933 et 1940, et établira le lien qu’elles entretiennent avec la production d’arts Décoratifs par Dufy durant les Années Folles.
Ce sont ainsi près d’une centaine de peintures à l’huile, gouaches, aquarelles, dessins, éditions provenant de collections tant publiques que privées du monde entier qui permettent de découvrir la manière dont cette ville, sa lumière, sa baie, ses traditions, son architecture influèrent sur l’oeuvre de Dufy qui occupe une place unique et essentielle dans l’art du XXe siècle.
En peignant de multiples fois des motifs marins et niçois tels poissons, baigneuses, coquilles, et palmiers et en créant des céramiques et des tissus somptueux, notamment en collaboration avec le couturier Paul Poiret et la firme Bianchini-Férier, Dufy a contribué à la diffusion d’un style Côte d’Azur.
Ebloui, comme hypnotisé par la vision de la baie des Anges depuis l’hôtel Suisse, Dufy l’a peint inlassablement en 1926 et 1927. Parfois l’angle de vue diffère, mais il se plaît à reproduire l’ensemble de la Baie, lorsque celle-ci s’arrondit sur la droite, laissant les yeux se noyer au loin sur la Promenade des Anglais puis sur une balustrade s’ouvrant sur une mer surplombée de collines. Le paysage s’anime tour à tour de silhouettes chics et chapeautées, longées par des calèches et chevaux et agrémenté de palmiers.
Les bleus de sa palette s’intensifient, s’approfondissent jusqu’à l’émeraude et le turquoise. Le noir est présent car, comme il l’expliquait lui-même, sa présence rend la lumière plus forte.
L’oeil de Dufy est unique,scrutateur et vif, de même sa rapidité d’esprit à saisir volumes et détails, à se remémorer les impressions et le sentiment de liberté ; ses carnets de croquis sont jalonnés de détails qui lui permettront de réaliser ses œuvres depuis son atelier comme s’il se trouvait face à la mer, installé avec son chevalet sur la baie niçoise.
Les œuvres de Dufy ne cèdent jamais à la facilité ; elles sont toujours empreintes de détails qui lui confèrent harmonie et richesse, mais demeurent cependant légères car l’artiste va toujours droit à l’essentiel. Il dessine avec dextérité ; la présence de plusieurs traits est faite pour susciter, suggérer, pour donner une vie frémissante au tableau.
Le casino de la jetée-promenade sera présent sur de nombreuses œuvres ; ce bâtiment éclectique construit sur pilotis dans les années 1880, inspire l’artiste qui le décore, ou le transforme en palais des mille-et-une-nuits. Dufy continuera à le dessiner et à le peindre notamment dans de nombreux dessins à l’encre, longtemps après qu’il se soit éloigné de la promenade des anglais, longtemps même après que le Vieux Casino ait été détruit par les Allemands en 1944.
Raoul Dufy puis son épouse Emilienne, conserveront toute leur vie quelques-unes des plus belles œuvres réalisées à Nice. Au décès du peintre, en 1962, Emilienne fit un legs très important en faveur du musée des Beaux-Arts Jules Chéret de Nice, sa ville natale.
Y figurent entre autres le magnifique Casino de la jetée-promenade aux deux calèches à Nice, daté de 1927, ainsi qu’une série de dessins à l’encre de Chine à thème carnavalesque, parmi près de 200 oeuvres de l’artiste qui toutes sont révélatrices de la joie de vivre de Dufy qui n’a eu de cesse de promener sur le monde qui l’entourait un regard plein d’émerveillement et d’enthousiasme.
« Si je pouvais exprimer toute la joie qui est en moi ! » disait-il.
Pari gagné car chaque œuvre de cet artiste reflète non seulement son talent mais surtout ce bonheur qui n’a jamais cessé de l’habiter et qu’il a réussi a parfaitement transcrire sur ses toiles.