Newsha Tavakolian : 5ème lauréate du Prix Carmignac du Photojournalisme

0
2171
Newsha Tavakolian pour la Fondation Carmignac
Newsha Tavakolian pour la Fondation Carmignac

Malgré le couvercle sous lequel elle semble vivre, malgré le sentiment de claustrophobie que lui ont imposé des siècles de domination, la population iranienne fait toujours preuve d’un incroyable courage, d’une force vive, d’un esprit créatif revendiquant la liberté.

Fidèle à cette volonté que lui insufflent ses racines, Newsha Tavakolian nous entraîne à travers les photos de son propre album familial dans l’Iran d’aujourd’hui, déchiré entre son désir de modernité et l’idéologie islamique révolutionnaire dont il est imbibé.

La jeune artiste nous livre des clichés criant, hurlant de vérité; derrière ces images consacrées à la classe moyenne, on devine les discussions animées voire secrètes entre amis et au sein des familles, dissimulées par une rigidité de façade.

C’est en cela que par ses photos, Newsha Tavakolian brise la glace et révèle cette société perse.

Fille fumant, Newsha Tavakolian

Fille fumant, Newsha Tavakolian

Née en 1981 à Téhéran, autodidacte, Newsha a commencé sa carrière dans la presse iranienne à l’âge de 16 ans, travaillant pour un quotidien local de Téhéran, et devenant deux ans plus tard la plus jeune photographe à couvrir le soulèvement étudiant de 1999, qui a été un événement déterminant pour le mouvement réformiste naissant du pays et pour Newsha sur le plan personnel, en tant que photojournaliste.

L’année suivante, elle rejoignait l’agence new-yorkaise Polaris Images, et entamait en 2002 une carrière internationale, couvrant la guerre irakienne pendant plusieurs mois, puis plusieurs conflits régionaux et catastrophes naturelles, réalisant des documentaires sociaux dans de nombreux pays.

Chauffeur de taxi, Newsha Tavakolian

Chauffeur de taxi, Newsha Tavakolian

Time Magazine, Newsweek, Stern, Le Figaro, Colors, The New York Times, Der Spiegel, Le Monde et National Geographic ont publié son travail, et d’importants musées internationaux, tels que le British Museum, le Victoria and Albert Museum, The Boston Museum of Fine Art et le LACMA l’ont exposée. Newsha Tavakolian participe cette année à la Biennale de Venise où elle présente une installation vidéo réalisée au cours de son projet pour le Prix Carmignac du photojournalisme, dans l’exposition collective Iran, The Great Game du 9 mai au 22 novembre 2015.

S’exprimant à propos de son reportage élaboré pour le Prix Carmignac dont elle vient d’être lauréate, elle déclare :

“Comme photographe, j’ai toujours lutté contre la perception de la société dans laquelle je vis, complexité et ses malentendus. Avec ce projet, j’ai décidé de continuer l’album de famille de ma génération. Pour ajouter les photos jamais prises de leur vie d’adulte telle qu’elle est aujourd’hui” (…) “Aujourd’hui, ce qui m’intéresse est de pouvoir communiquer, à travers ce travail, les sentiments de certaines personnes qui vivent en Iran” (…) “Ce que je souhaite c’est représenter une génération marginalisée par ceux qui parlent en son nom.”

Newsha Tavakolian

Newsha Tavakolian

Newsha Tavakolian a ainsi suivi neuf personnes ordinaires de sa génération, qui ne retiennent pas l’attention des médias, mais qui représentent la jeunesse iranienne, c’est à dire 80% de la société. Voulant représenter les problèmes qui affectent les iraniens dans leur vie de tous les jours, elle a vécu cette expérience comme un défi, un challenge, doutant de son interprétation, tant son pays est complexe et diversifié.

Jeune femme, Newsha Tavakolian

Jeune femme, Newsha Tavakolian

Newsha Tavakolian ne cherche pas à imposer sa vision de l’Iran, elle montre son pays tel qu’elle le ressent, tel qu’il lui apparaît, tel qu’elle le vit, avec toute son honnêteté, souhaitant confronter son jugement à celui du public. Elle a souhaité donner une vision contemporaine de sa patrie, faire passer le message de son évolution, de sa soif de modernisme et de l’incroyable vitesse à laquelle elle se transforme. L’artiste souligne l’importance de sa féminité, les femmes, par la confiance qu’elles inspirent, ayant plus de facilité à étudier la société iranienne en profondeur.

L’exposition est accompagnée d’un livre publié à cette occasion par les éditions Kehrer Verlag et réalisé par Anahita Ghabaian.

Un bien beau prix octroyé avec justesse et discernement à une jeune artiste au talent déjà fort
charismatique et porteur d’espoir pour toute une génération d’iraniens.

Infos pratiques

Exposition du 13 mai au 7 juin 2015
Chapelle des Beaux-Arts de Paris
14, rue Bonaparte – 75006 Paris
Entrée libre