L’ONU, échec de la stratégie répressive dans la guerre à la drogue

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L’échec de la guerre contre les drogues ! La session extraordinaire de l’Assemblée générale des Nations unies, du 19 au 21 avril à New York, devrait marquer un tournant dans l’approche de la politique sur les stupéfiants

L’ONU a tenu cette semaine un sommet consacré à « la guerre à la drogue », sommet qui aurait du avoir lieu en 2019, mais l’urgence de la situation est telle qu’il était impossible d’attendre trois années supplémentaires.

Les chiffres sont effectivement alarmants : sur les 27 millions de personnes consommant de la drogue, 400 000 meurent chaque année alors que 1000 milliards de dollars sont dépensés annuellement pour lutter contre ce fléau dont 50 milliards uniquement pour les USA ! L’offre et la demande sont toujours aussi fortes, et selon l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime, le narcotrafic rapporte 300 milliards de dollars annuels de chiffre d’affaires.Parallèlement, les incarcérations se sont multipliées sans qu’une réelle politique thérapeutique ait été mises au pointet le virus du sida et les hépatites galopent…Ainsi en Russie, les cinq dernières années ont vu le nombre des séropositifs quadrupler, atteignant un million de personnes.

C’est à l’initiative de plusieurs pays d’Amérique Latine, notamment le Guatemala, le Mexique et la Colombie, trois pays qui ont payé le prix fort dans la lutte contre la drogue, que s’est tenue cette assemblée spéciale, l’ objectif était de redéfinir la stratégie actuelle, basée sur la prohibition, et de revaloriser et mettre plutôt en avant les droits de l’homme, la prévention et la santé publique.

Malheureusement, les résultats escomptés n’ont pas été atteints. Le texte de la résolution finale, adopté mardi, reprend essentiellement la même façon d’aborder le problème, en soulignant notamment que « le fondement du régime international de contrôle des drogues » demeure les trois conventions sur les stupéfiants, qui sont axées sur la prohibition. Les ONG, qui souhaitaient une déclaration d’échec de la guerre contre la drogue et l’adoption d’une approche axée sur la santé publique, ont vécu cette assemblée comme une nouvelle défaite. « Il faut modifier le système international de contrôle des stupéfiants, mais encore faut-il savoir comment le faire ou avoir une proposition qui suscite un certain consensus », souligne Guillermo Aureano, chercheur associé au Centre d’études et de recherches internationales de l’Université de Montréal. Selon lui, les pays qui souhaitaient des modifications n’avaient pas de solution de rechange à proposer à la prohibition. C’est donc le statu quo qui s’est imposé, ce qui fait dire au chercheur qu’il s’agit d’une « opportunité perdue ».

Cette inaction s’appuie aussi sur la division de la communauté internationale. Si certains pays, parmi lesquels la Colombie, le Mexique, la Suisse et le Portugal, souhaitaient une approche « plus équilibrée », plusieurs pays dont la Chine, la Russie, la Thaïlande, Indonésie et Singapour, sont opposés à toute altération à la stratégie. Par ailleurs, l’Union européenne qui souhaitait obtenir une dénonciation de la peine de mort pour le trafic de stupéfiants n’a pas obtenu gain de cause. Une trentaine d’États au monde, dont l’Arabie saoudite, la Chine, la Malaisie, les Émirats arabes unis et le Vietnam, continuent d’appliquer la peine capitale pour la possession ou le trafic de stupéfiants, ce qui constitue une violation du droit international. Comme l’a souligné Danièle Jourdain-Menninger, présidente française de la mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives, « plus personne ne soutient la guerre contre les drogues » à l’ancienne, malgré «  un contexte international très clivant ».

En attendant, puisque les traités internationaux demeurent en vigueur, l’alternative est de procéder à des changements au niveau national. C’est dans cette optique que de nouvelles recommandations ont été adoptées cette semaine par la session spéciale de l’Assemblée générale, actant pour «Une approche centrée sur la santé publique». Le nouveau plan de lutte sera élaboré en 2019, les trois années à venir ne seront pas de trop pour obtenir un réel changement….

Photo : Héroïne. Photo ONUDC (archives)

Danièle Jourdain Menninger présidente de la Mission interministérielle de lutte contre les drogues et les conduites addictives revient sur les grandes lignes de ces nouvelles recommandations qui prônent une approche équilibrée. Elle est interrogée par Charlotte Baechler (Source : radiovaticana.va)