Les savoir-faire liés au parfum en pays de Grasse au Musée International de la Parfumerie

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    Musée International de la Parfumerie

    La culture des plantes à parfum en Pays de Grasse est le premier volet de l’exposition. La culture des plantes à parfum a sculpté le paysage olfactif du Pays de Grasse et a contribué à son identité. Les trois fleurs emblématiques du Pays de Grasse y sont cultivées depuis le XVIIème siècle : rose, jasmin, tubéreuse, auxquelles s’ajoutent principalement la violette, la fleur d’oranger, le mimosa et l’iris.

    La spécificité du Pays de Grasse repose sur un ensemble de terroirs différents, rassemblant trois critères fondamentaux pour la culture des plantes à parfum, dans une heureuse conjugaison :

    • Les sols
    • Les climats
    • Les savoir-faire liés à l’histoire et à la mémoire transmise.

    A chacune des plantes constitutives de l’identité du Pays de Grasse correspond un terroir, au sens agronomique et climatique bien défini. On parle de zones et de quartiers de production.

    Le cultivateur sélectionne les plants en fonction de leurs qualités olfactives et veille à leur développement optimal, dans les meilleures conditions de culture : amendement et drainage du sol, période de plantation, ensoleillement, humidité, conditions de culture, greffe des sujets, hivernage, bouturage, taille… C’est le cultivateur qui décide du début de la cueillette, en fonction de la maturité des fleurs.

    La cueillette des fleurs est exclusivement manuelle -la cueillette mécanisée du jasmin a été tentée mais ne s’est pas révélée probante- essentiellement réalisée par des femmes (les hommes travaillant dans les usines). Elle requiert un savoir-faire que les cueilleurs et cueilleuses ont appris de leurs ascendants et transmettent aux jeunes générations : horaires de cueillette pour obtenir une odeur parfaite, techniques pour ne pas abîmer la plante, utilisation du tablier ou du panier en fonction de la fragilité de la fleur…

    La cueillette de la rose a lieu de mai à juin. Elle commence dès l’aube avant qu’il ne fasse trop chaud. La fleur est alors fraîche et gorgée de rosée. Les cueilleuses récoltent chacune entre 10 et 20 kilos de pétales de rose, ou 4 kilos de fleurs de jasmin, chaque jour. Pour les roses, elles portent des paniers ou de grands tabliers. Elles en remontent les bords qu’elles fixent à la taille pour pouvoir accumuler les fleurs cueillies avant de les réunir dans des corbeilles. Les corolles des violettes et les fleurs des tubéreuses sont, elles, placées dans des petits paniers attachés à leur taille. Les fleurs de jasmin, très fragiles, sont placées dans de vastes paniers recouverts d’un linge humide pour éviter qu’elles ne se dessèchent.

    La connaissance des matières premières naturelles et leur transformation

    La connaissance des matières premières naturelles dans le Pays Grassois commence dès les champs, où cueilleurs, cultivateurs, courtiers évaluent, en les comparant, les qualités olfactives des différentes récoltes.

    Elle se poursuit dans les ateliers, où le contremaître se charge de noter quotidiennement les rendements de chaque plante. Il est indéniable que l’essor du parfum en Pays de Grasse s’est fondé sur cette accumulation de connaissances sur les végétaux. Les éléments recueillis offrent ainsi une expertise faite d’une pratique quotidienne d’ajustement du mode de traitement à la matière première traitée.

    Au début du XXème siècle, avec le développement de la chimie de synthèse et l’avènement de nouvelles techniques d’extraction, le besoin s’est fait sentir de rationnaliser encore davantage toute cette masse d’informations recueillie. Débute alors la publication, dans le cadre de revues professionnelles, scientifiques et techniques, d’études sur la constitution chimique des substances naturelles.

    La transformation des matières premières en parfumerie présente l’ensemble des actes techniques de fabrication d’essences odorantes entrant dans la composition des parfums. Qu’elle soit artisanale ou industrielle, la production de parfum a toujours intégré cette étape de transformation d’un organisme pour en recueillir l’odeur qui le caractérise.

    La transformation comprend également l’invention et la réalisation de l’appareillage nécessaire à la mise en oeuvre de ces procédés. Chaudronniers, et auparavant layetiers et ferblantiers locaux, ont donc été impliqués dans la constitution et la consolidation de ce savoir-faire.

    Le bassin Grassois a incontestablement contribué, au XVIIIème siècle, à la promotion des produits obtenus grâce à ces procédés et ce matériel ; puis, au cours des XIXème et XXème siècles, il a oeuvré à leur amélioration. Riche de cet héritage technique, l’ensemble de cette région demeure, aujourd’hui encore, la référence incontournable en matière de production d’extraits odorants.

    Puisant sa légitimé de son implication dans la captation des odeurs d’origine naturelle, la parfumerie du Pays Grassois s’est également adaptée aux progrès scientifiques de son temps.

    Aux deux techniques historiques d’extraction – la distillation par vapeur d’eau et l’enfleurage aux corps gras – totalement réinventées par les industriels parfumeurs et chaudronniers Grassois au milieu du XIXème siècle, se sont ajoutées d’autres méthodes.

    Dès le début du XXème siècle, l’extraction par solvants volatils (mise au point à Grasse quelques décennies plus tôt), ainsi que le fractionnement et la composition de bases parfumantes, ont permis d’enrichir la palette des parfumeurs tout en maintenant le recours à des extraits d’origine naturelle. Car l’apparition (également durant les années 1900) d’une industrie de production d’extraits intégralement synthétiques, aurait pu sonner le glas de l’industrie dite du « naturel ».

    Ce n’est qu’en combinant une approche à la fois fidèle à leur histoire et ouverte sur les évolutions contemporaines que des entreprises de transformation du Pays Grassois ont pu conserver toute leur pertinence. En effet, depuis les grands progrès énumérés ci-dessus, qui ont provoqué, vers 1900, un véritable virage, une accélération fulgurante du métier, voire une révolution du secteur, chaque génération a connu son propre parcours initiatique et a apporté sa pierre à l’édifice.

    L’art de composer le parfum

    Le parfumeur a changé plus d’une fois de statut, s’adaptant au cours de l’histoire mais trouvant aussi de nouvelles postures qui ont fortement influencé l’évolution de la parfumerie. Il a d’abord oeuvré comme artisan travaillant, comme Jean-Louis Fargeon, parfumeur de Marie-Antoinette.

    Le premier grand changement a eu lieu quand des créateurs, à la fin du XIXème siècle ont proposé des compositions finalisées qu’ils nommaient et vendaient en boutique. Le parfumeur devient alors l’interprète et l’inspirateur olfactif de l’univers des créateurs de mode. Le parfum s’est ainsi ouvert à de multiples d’expression, d’histoires, d’émotions, d’interprétations. Il est sorti de l’artisanat lié à des commandes individuelles et circonscrites géographiquement pour devenir un moyen d’expression, de notoriété et de créativité, cristallisant l’esprit d’une époque, un, métier, une marque, une personnalité.

    Une démarche individuelle et plurielle : Composer un parfum suppose d’assembler, de bâtir, à partir de matières premières naturelles et synthétiques, une architecture olfactive savante, propre à chaque parfumeur.

    Quand on questionne les parfumeurs sur leur manière d’envisager l’art de créer un parfum, des éléments communs se dégagent cependant, tels que :

    • Savoir sentir / éduquer l’olfaction : mémoriser les odeurs et savoir les associer (accords),
    • Développer son côté intuitif, faire appel à l’abstraction, l’imagination,
    • Noter ses propres impressions olfactives.

    La composition n’est pas qu’un mélange exécuté au petit bonheur, elle résulte de choix éclairés, délibérés et motivés par la connaissance approfondie des matériaux et de leurs capacités réciproques d’association. Les arrangements d’odeurs sont d’ordre esthétique. Il faut d’abord concevoir, inventer une « forme olfactive » originale. Imagination, intuition y pourvoiront sous le moindre prétexte, comme dans les autres arts. Pour que la composition ait une valeur artistique il faut et il suffit que ses constituants soient délibérément choisis et proportionnés de telle manière qu’ils se conjuguent significativement pour donner une forme spécifique, donc reconnaissable, intéressante et harmonieuse. Ce sont toutes ces exigences qui satisfaites feront d’un mélange un parfum et du parfum une oeuvre d’art.

    Pour les parfumeurs, l’intérêt de se former, d’exercer ou de passer dans le Pays Grassois est crucial parce qu’ils y voient « une campagne qui sent », « le coeur de la distillation des matières premières », « les racines de la parfumerie occidentale », « un milieu propice à l’émulation car tous les corps de métier sont présents », « un creuset où l’échange d’idées est possible »…

    Qu’ils soient originaires du Pays de Grasse ou venus s’y installer, les parfumeurs reconnaissent, qu’ici plus qu’ailleurs, sont réunis tous les savoir-faire liés à la matière première naturelle, à sa transformation et à la composition. Autrement dit, un réseau dense, un foyer d’inspiration, un gisement de savoirs uniques, de connaissances, de transmission. Travailler ou passer régulièrement par le Pays Grassois relève d’un acte d’authenticité, de recherche de perfection, de beauté, de «profondeur « dans la pratique de leur art.

    • Exposition du 14 décembre au 31 mars 2014

    Musée International de la Parfumerie

    A lire aussi sur le sujet : Le Roman du parfum de Pascal Marmet

    À six mille pieds au-dessus des nuages, entre Paris et Los Angeles, l’acteur Tony Curtis souffle ses derniers printemps tandis qu’une jeune inconnue au «nez absolu» amorce une carrière dans le parfum. Une discussion s’engage, leur amitié s’ébauche. Tony Curtis devient l’atomiseur qui répand les senteurs et se mue en joyeux répétiteur du cours d’histoire que Sabrina doit apprendre sur le bout du nez. De l’Égypte antique aux créateurs parfumeurs du XXIe siècle, vous saurez tout sur le parfum : ses écoles, ses nez, ses secrets de fabrication, ses mensonges, son marketing, son immense pouvoir sur nos sociétés, et sa poésie. Mais tout commence sous l’auvent d’un libraire de Grasse. L’auteur rencontre une jeune femme au nez peu ordinaire. Sous une pluie battante, elle lui confie son histoire. Un roman à la frontière du reportage, un livre document capiteux et captivant, instructif et troublant. Pascal Marmet est écrivain, romancier, chroniqueur radio, organisateur de rencontres littéraires. Il est l’auteur de À la folie (France-Empire, 2012) et Si tu savais… (France-Empire, 2010). Le roman du parfum aux éditions Du Rocher vient d’être primé Il vient de recevoir le Prix spécial du Jury Albayane 2013 Albayane était le premier journal (quotidien) Francophone au Maroc ! Un livre captivant qui vous emporte dans un monde plein de belles et de bonnes odeurs. Un livre enivrant qui vous raconte à sa façon l’histoire du parfum et les secrets de sa fabrication.