Le temps d’une soirée, retrouvez-vous dans une gare désaffectée qui va devenir le théâtre des souvenirs du passé d’un homme marginalisé. C’est la veillée de Noël, seul un clochard se lamente ; aujourd’hui vieil homme fatigué et amer, il se souvient du jeune employé de gare naïf qu’il était. Peu à peu, les fantômes du passé resurgissent et grâce à eux, la gare retrouve tout son entrain ; le vieil homme va revivre les trois décennies qui viennent de s’écouler, trois décennies emplies d’instants uniques, de départs ou d’arrivées, moments oppressants ou heureux auxquels il a assisté ou bien même participé, ou bien encore être témoin de la vie de ces femmes et ces hommes de l’ombre, comme les nettoyeuses ou les errants.
La gare, carrefour de toutes les émotions, sent à nouveau bon la vie, cette vie qui n’est autre qu’une succession de scènes universelles. A la fois drôle et touchante, emplie d’émotions, de tout ce qui réunit les êtres humains, les joies, les chagrins, les retrouvailles et les ruptures, cette pièce est caractéristique de l’œuvre de la comédienne et dramaturge française Denise Bonal qui, durant toute sa carrière, a aimé traiter de faits divers et plus particulièrement de conflits familiaux. Une pièce forte qui interpelle les spectateurs, telle cette superbe réplique extraite d’une des tranches de vie : « La gloire du suicidé, c’est de prévoir qu’avec une seule balle, il impose aux autres une interrogation qui n’aura jamais de réponse ».
Denise Bonal est née dans l’Algérie des années 20 où elle passe toute son enfance, n’arrivant à Paris que pour ses douze ans. C’est durant son année d’hypokhâgne (1939-1940) qu’elle fait sa première mise en scène: celle d’ Aucassin et Nicolette (pièce en vieux français dans laquelle elle voit des allusions perfides aux occupants). Passionnée, elle décide alors d’abandonner ses études et rejoint le cours du théâtre de Charles Dullin. Sa première tentative d’écriture est un montage de textes, venus du monde entier, sur les activités des hommes sur la terre. Engagée à la comédie de l’Ouest au Centre Dramatique de Rennes en 1951, elle y restera 15 ans, écrivant en parallèle pendant cette époque des contes et des nouvelles radiophoniques à raison d’un écrit hebdomadaire, tout en continuant à jouer sur scène.
En 1971, Denise Bonal rejoint Hubert Gignoux au Théâtre National de Strasbourg, enseigne au Conservatoire National de Roubaix, s’engage dans l’écriture et devient dramaturge en 1971.
Elle achèvera sa carrière en tant que professeur titulaire au Conservatoire national supérieur de Paris et au Cours Florent, carrière récompensée par de nombreux prix, Prix d’Enghien en 1975 pour Les Moutons de la nuit, Prix de la radio de la SACD en 1980, Prix du théâtre de la SACD en 1986, Prix Arletty en 1988 pour l’ensemble de son œuvre, Prix European Drama en 1994 pour Féroce comme le cœur, Molière du meilleur auteur francophone vivant en 2004 pour Portrait de famille, Grand prix de littérature dramatique en 2006 pour De dimanche en dimanch. « Les pas perdus » nous donnent l’occasion de retrouver cette talentueuse femme de théâtre disparue en 2011 et de se pencher sur les souvenirs exprimés dans ces tranches de vie, souvenirs qui sont aussi un peu les nôtres et que Nicolas Gille a su si bien mettre en scène, donnant tout l’écho indispensable à l’émotion qu’ils transportent.
Cie Les Récrés-Acteurs
Une pièce de Denise Bonal
Mise en scène de Nicolas Gille
Avec : Emilie Crespin, Cyril Damet, Christelle Favereaux, Chloé Mahy et Clément Hassid.
Lumières par Elodie Murat
Décors par Claire Damel
Visuel par Grégory Dassié
Les pas perdus
Du 20 novembre au 30 janvier 2016
AKTEON Théâtre
11 rue du Général Blaise 75011 Paris
www.akteon.fr
Les vendredis et samedis à 20 h
Durée 1h05