Traversé par l’histoire et la mémoire européenne de Douaumont à Auschwitz, jusqu’à la chute du mur de Berlin, le travail de Stéphane Duroy se nourrit d’une exploration des États-Unis, terre d’accueil des exilés du Vieux Continent.
Depuis quarante années, Stéphane Duroy s’intéresse à la « vieille Europe ». Il réalise ainsi tout un travail sur les grands bouleversements que connait l’Angleterre à l’époque du thatchérisme et les laissés-pour-compte, ouvriers et marginaux qui se trouvent plongés dans la détresse ; Le livre Distress (paru tardivement en 2011), est l’aboutissement d’une plongée de plus de trente années dans un pays profondément meurtri.
Il s’envole dans la foulée pour le Montana à la rencontre des immigrés européens où il se trouve confronté à une version désenchantée du « rêve américain ». Il en revient avec des images d’une grande mélancolie et d’une extrême sobriété, et publie en 2007 le livre Unknown. Il entreprend dans les années 80 L’Europe du Silence, un travail qu’il réalise sur les traces de la grande Histoire : Douaumont, Berlin, Auschwitz, Lodz… la chute du Mur le conduisant après Berlin-ouest dans l’ex-Allemagne de l’Est et en Pologne. Ses clichés de cette époque sont révélateurs du silence et de l’inquiétude qui rodent dans les paysages et dans les villes européennes. Ils lui vaudront en 1991, le World Press Photo, le premier prix dans la catégorie “nature et environnement” pour sa photo sur la pollution dans l’ex-République démocratique allemande. I L’ensemble des photos montre un homme à la recherche de son identité et de la mémoire d’une Europe ébranlée par deux conflits mondiaux et de multiples dérives totalitaires. Les 20 images du livre paru en 2000 sont emplies de poésie et d’émotion. La Fondation Calouste Gulbenkian lui octroie une bourse en 2003 pour faire un travail qui couvre le Portugal.
Depuis 2009, Stéphane Duroy a quitté la photographie pure pour donner une nouvelle version à ses images, usant de techniques qui épuisent et effacent la surface ses images : collages, grattages, coupures de presse, photographies anonymes, peintures, ratures et déchirures détruisent et de reconstruisent ses photographies, qui s’étaient selon lui appauvries, en y par ajoutant des couches de matières successives. Stéphane Duroy dépasse ainsi les frontières de la photographie, en casse les codes et explore de nouveaux territoires d’expression. Témoin vivant d’un monde devenu oppressant et irrespirable, il déracine son langage et donne une nouvelle forme à ses histoires, forme qui l’emmène au-delà de lui-même.
Photo : Stéphane Duroy
Stéphane Duroy : Again and Again
Exposition jusqu’au 09 avril 2017
Le Bal
6, Impasse de la Défense
75018 Paris