Intermittents du spectacle : le gouvernement fait un geste financier, la CGT veut reconduire la grève

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“L’Etat s’engagera dès le 1er juillet, il prendra lui-même en charge ce différé, c’est-à-dire qu’il le financera pour que Pôle Emploi n’ait pas à l’appliquer aux intermittents concernés”, a déclaré le premier ministre. L’Etat va prendre en charge, de manière transitoire le manque à gagner pour l’Unedic de la mesure la plus contestée par les intermittents du spectacle, le différé d’indemnisation, qui ne s’appliquera donc pas au 1er juillet, a annoncé hier le premier ministre. La mesure coûtera à l’état aux alentours d 90 millions d’euros en année pleine, a précisé Manuel Valls lui-même lors d’une conférence de presse à l’issue de la remise du rapport de Jean-Patrick Gille sur le dossier des intermittents.

Manuel Valls a confié à trois personnalités une mission pour redéfinir le statut d’intermittent du spectacle, lesquelles devront rendre leurs conclusions avant la fin de l’année. Il s’agit d’Hortense Archambault, qui a codirigé le Festival d’Avignon, Jean-Denis Combrexelle, ancien directeur général du Travail, et Jean-Patrick Gille, député PS nommé par le gouvernement comme médiateur dans le conflit.

Aurélie Filippetti avait d’ores et déjà indiqué, lors de la séance des questions au Sénat, la ministre de la Culture,que les «annonces» de Manuel Valls répondraient à «un double objectif : sortir de la crise dans laquelle nous nous trouvons et préserver la vie de nos festivals pour qu’on n’entende pas résonner le silence, la mort et la tristesse cet été dans les rues de nos villes». Mais aussi «refonder profondément un système» pour qu’il soit «plus juste, plus équitable».

Lundi dernier artsixMic était présent lors de la manifestation des intermittents du spectacle au Palais Royal, devant les fenêtres du conseil d’état et aux pieds du ministère de la culture.

Allocution de Manuel VALLS, Premier ministre du 19 juin 2014

Madame la ministre, Monsieur le ministre, Mesdames, Messieurs,

Le Gouvernement que je dirige a une responsabilité et une méthode. La responsabilité, c’est celle de prendre des décisions pour que notre pays avance. La méthode, c’est celle du dialogue social, de l’écoute. Nous le faisons et nous le ferons avec les partenaires sociaux parce que c’est ainsi que nous pourrons conduire les réformes nécessaires au pays.

Et ce que nous affirmons avec Aurélie FILIPPETTI, avec François REBSAMEN, c’est que notre pays ne peut pas avancer sans la culture ; sans les artistes, les créateurs, les interprètes, les techniciens, qui, chaque jour, mettent l’oeuvre, la création, l’émotion, la sensibilité, au coeur de nos vies.

Chaque année, des milliers de spectacles sont donnés, partout en France, dans le cadre des festivals. Depuis cette intuition fabuleuse de Jean VILAR à Avignon, les festivals sont devenus de vrais succès populaires ! De même, chaque année, un millier de représentations lyriques attirent près d’un million et demi de spectateurs. Les cinémas font 200 millions d’entrées annuelles, dont près de 40% pour voir des films français ; c’est une performance inégalée et enviée en Europe. Enfin, chaque année, près de 40 000 représentations de spectacles de variétés et de musiques actuelles ont lieu.

Cette rencontre entre l’art et le public se fait sur tout le territoire, grâce à nos compagnies théâtrales, nos compagnies chorégraphiques, nos cinémas. La France, c’est la culture. La France aime la culture. Et ce gouvernement est aux côtés de celles et ceux qui la font vivre.

Depuis plus de 50 ans – c’est l’honneur de notre pays ! – la France a su trouver un consensus pour donner à la culture toute sa place dans nos politiques publiques et dans notre société. Pour qu’elle ne soit pas le privilège de quelques-uns, mais un bien commun, qui puisse être accessible au plus grand nombre.

Sans culture, la vie n’est que sécheresse. La culture, ce n’est pas un supplément d’âme. Non ! C’est l’âme de notre pays. Elle innerve notre société. Elle en assure la cohésion. Elle rassemble. Elle fédère. Elle dit beaucoup de ce que nous sommes. La culture, c’est l’épanouissement, c’est l’émancipation des individus.

Oui, nous avons besoin de nos artistes. Et je le dis plus encore au moment où notre société est traversée par les doutes, par les tentations de repli, de rejet. La culture, c’est une ouverture à l’autre. Une ouverture sur le monde. C’est aussi un patrimoine et notre identité.

Soutenir la culture, c’est aussi investir dans un secteur performant aux retombées économiques et touristiques évidentes. On l’oublie trop souvent, notre culture est l’un de nos grands secteurs d’excellence. C’est plus de 3 % de notre PIB, et de très nombreux emplois. C’est aussi une source de vitalité, de dynamisme, d’attractivité pour nos territoires et nos villes qui, aux côtés de l’Etat, développent des politiques culturelles souvent très ambitieuses.

Face à la mondialisation et à la diffusion massive des produits culturels, plus que jamais, la France doit soutenir la culture, défendre son exception.

Le spectacle vivant, le cinéma, l’audio-visuel, la musique, ce sont des hommes et des femmes, artistes et techniciens. Beaucoup sont ce que l’on appelle des intermittents. C’est-à-dire qu’ils sont, par la nature même de leur activité, dans une certaine précarité, sans la protection qu’apporte – même si elle n’est pas absolue – un CDI. Pour répondre à cette condition très particulière de l’intermittent du spectacle, les partenaires sociaux ont développé, depuis des décennies, une réponse originale et protectrice : les annexes 8 et 10 de l’assurance-chômage. Elles permettent d’adapter le système de l’assurance-chômage aux professions du spectacle.

Ce régime particulier des annexes 8 et 10 nous le devons, je veux le rappeler – et personne ne doit l’oublier – aux partenaires sociaux qui ont fondé l’UNEDIC et qui, convention après convention, les ont reconduites. Toute la profession doit être reconnaissante de cette solidarité interprofessionnelle qui s’exerce.

Au fil des années, ces annexes ont pris une place de plus en plus importante dans l’économie de la culture, avec c’est vrai – il faut le reconnaitre – des dérives et des abus. Des dérives et des abus qui ont paradoxalement contribué à « précariser » les emplois.

Avec des conséquences évidemment sur l’équilibre de l’assurance chômage dans son ensemble ; même s’il faut récuser l’idée que chaque segment de l’assurance chômage doit être en lui-même équilibré. Ce serait absurde dans un système basé sur la solidarité interprofessionnelle …

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