Soixante‐quinze peintures, dessins, collages, objets et assemblages, sont réunis au centre Pompidou pour la rétrospective de l’œuvre d’Hervé Télémaque, artiste français d’origine haïtienne. Hervé Télémaque arrive à Paris au début des années 60 après trois années passées à New York où il s’exerce à l’expressionnisme abstrait ,présent dans ses premières peintures. Son professeur Julian Levi à New York, qui était un juif polonais voulait qu’il devienne un peintre américain le plus vite possible et lui avait dit :
“Achète une télévision pour apprendre l’anglais et fais‐toi naturaliser.” Ce qu’il ne fera pas.
Proche du groupe surréaliste mais sans y adhérer, l’artiste emprunte des objets à la société de consommation et à la culture populaire pour produire des œuvres autobiographiques. Hervé Télémaque veut s’ancrer dans la réalité, dans le quotidien, il veut échapper à l’abstraction jusque dans ses propres titres.
photo : Philippe Migeat, Centre Pompidou
En 1964, il adopte la “ligne claire” inspirée par Hergé, et introduit des objets sur la toile en 1966 avec sa série des “Combines paintings“, évoquant celles de son contemporain Martial Raysse. Ses peintures ont une forte portée critique, évoluant entre la contre‐culture et l’anticolonialisme.
Entre 1968 et 1969, il cesse de peindre pour se consacrer exclusivement l’assemblage avec ses “sculptures maigres“, tels les ready‐made de Duchamp. La canne blanche emblème de la cécité, y jouant un rôle primordial.
Au début des années 90, Télémaque réalise des dessins de grand format au fusain ainsi qu’une importante production de reliefs en bois de récupération où la scie sauteuse remplace le crayon et qui sont recouverts de marc de café.
La maladie suivie de la mort de sa mère et liée aux souvenirs du Vaudou haïtien plongent Télémaque dans le thème du deuil, l’artiste pratiquant sa propre magie à l’aide de chauve‐souris, de tête de mort et de mélanges de marc de café et aux pigments de couleurs.
Avec les années 2000, il revient aux sources africaines dont se réclame le courant de la “négritude” et a un nouveau regard porté sur l’actualité politique française, éventuellement teinté d’humour. Il se remet aux gravures et aux lithographies pour deux ouvrages de Serge Fauchereau, puis, suite à plusieurs séjours en Afrique, il réalise une série de peintures à l’acrylique intitulée “Trottoirs d’Afrique“.
Si Hervé Télémaque s’est toujours inscrit dans un parcours suivant l’évolution et les questionnements intellectuels de l’art moderne du XXe siècle, l’évocation de son pays et de ses origines, n’aura jamais quittée son œuvre :
“Je me suis servi de mon autobiographie de métis et d’Haïtien pour structurer un double langage fondé à la fois sur le politique et sur le social, autour de la question de l’identité et du racisme”.
Infos pratiques
Jusqu’au 18 mai 2015
Centre Pompidou, Paris