Alors que le Brexit relance le débat sur l’indépendance de l’Ecosse, c’est vers ses rivages que nous invite à faire cap Francesca Piqueras.
Dans ses premières séries sur les structures maritimes, le point de fuite des photographies de Francesca Piqueras était constitué par l’horizon marin. Son propos était alors essentiellement de souligner la fragilité des œuvres humaines face aux éléments naturels. Le changement qu’elle opère ici et qu’elle a initié dans sa série “In Fine” (2018), prise en Sibérie, marque au propre comme au figuré un changement de perspective.
Ses photographies sont moins méditatives, plus frontales. Le rapport aux éléments et à la lumière est à la fois plus naturaliste et plus nuancé. Si son œuvre atteint un point de maturité en continuant à nous interroger sur la destinée humaine au travers de ses artefacts, il ne s’agit plus de les confronter à l’élément marin mais à ce rivage qui apparaît désormais en arrière-plan.
Alors que le Brexit relance le débat sur l’indépendance de l’Ecosse, c’est vers ses rivages que nous invite à faire cap Francesca Piqueras. Les plateformes pétrolières comme les dispositifs militaires en ruine qu’elle a pris pour sujet apparaissent dans ses photographies comme des monuments immémoriaux qui délimitent ce territoire au destin singulier. Un territoire que Piqueras interroge depuis la mer en nous offrant, comme toujours, des images au fort pouvoir métaphorique.
Ces structures de béton et d’acier permettent à Piqueras de jouer sur les paradoxes. D’abord parce qu’emblématiques de l’ère industrielle, elles paraissent ici sorties du fond des âges. Les plateformes évoquent des totems érigés à la gloire de quelques divinités marines. Les enfilades de pyramides de Cramon font écho aux alignements de Sphinx de Louxor. Les cibles de Luce Bay font penser à ces pierres levées du mégalithique, que l’on trouve d’ailleurs en nombre en Ecosse.
Autre paradoxe sur lequel joue la photographe : si ces plateformes et ces vestiges marquent les liens étroits (militaires, économiques) de l’Ecosse avec le reste du Royaume-Uni, ils semblent ici délimiter et isoler le “territoire tranquille” que l’on aperçoit en arrière-plan de ses photographies.
Francesca Piqueras : TERRITOIRE TRANQUILLE
Exposition du 18 février au 5 avril 2020
55 rue de Seine
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