La ministre de la Culture et de la Communication, Audrey Azoulay, lance une réforme des dispositions réglementaires relatives aux conditions d’interdiction des œuvres cinématographiques aux mineurs de moins de 18 ans
Audrey Azoulay la nouvelle ministre de la culture a publié, le 29 février, un rapport proposant de réformer les interdictions de films aux mineurs. Réalisé par Jean-François Mary, président de la commission de classification des œuvres du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC), ce document liste différentes propositions visant à faire évoluer une réglementation qui n’est plus d’actualité. Notamment de revoir les critères permettant à la justice de contredire les visas donnés aux films par le ministère de la culture, et de limiter le nombre et les délais des procédures judiciaires contestant ces décisions.La ministre a décidé d’engager une réforme des textes en vigueur afin d’assurer la meilleure protection possible du jeune public. Il s’agit, d’une part, d’adapter les critères qui encadrent actuellement l’interdiction aux mineurs de -18 ans pour conforter le rôle et élargir le pouvoir d’appréciation de la Commission de classification, qui représente l’ensemble des composantes de la société. Une modification de la partie réglementaire du Code du Cinéma et de l’image animée permettra à la Commission de classification d’apprécier l’effet perturbant que peut avoir un film sur les jeunes spectateurs et d’éviter ainsi toute automaticité du classement des œuvres. Il s’agit, d’autre part, d’engager une réflexion visant à simplifier les voies de recours pour réduire les délais de la procédure devant la justice administrative pour assurer la détermination de la classification d’un film.
Alors que l’association catholique Promouvoir attaque de plus en plus de longs-métrages, le rapport préconise une nouvelle rédaction de l’article en question: l’interdiction aux moins de 18 ans reposerait désormais sur la présence dans le film, « sans justification de caractère esthétique » de « scènes de sexe ou de grande violence » pouvant « troubler gravement la sensibilité des mineurs » ou « banaliser » la violence. C’est Fleur Pellerin qui, en septembre 2015, avait commandé à Jean-François Mary ce travail de réflexion, après la reclassification par la justice, saisie par l’association Promouvoir, de plusieurs films dont Love (2015) de Gaspar Noé, passé de « interdit aux moins de 16 ans » à « interdit aux moins de 18 ans ».
La conclusion du rapport de Jean-François Mary
La représentation des films en salles, dont certaines augures annonçaient il y a quelque temps le déclin, réunit chaque année près de 200 millions de spectateurs. Certes, ce chiffre semble presque dérisoire si on le compare à la puissance de la télévision et des réseaux Internet en termes de producteurs et de diffuseurs d’images. Cependant, la classification des films en salles reste une référence, référence instituée par le droit du cinéma qui oblige, lorsque le visa d’exploitation cinématographique comporte une interdiction particulière de représentation et que le film est édité sous forme de vidéogramme ou diffusé par un service de télévision ou par tout procédé de communication électronique, de mentionner cette interdiction (R. 211-22 et suivants du CCIA). Du côté des réalisateurs, la demande d’un visa d’exploitation a aussi pour objet de faire accéder l’oeuvre ou le document au statut de film de cinéma, quels que soient les aléas de sa carrière commerciale. Une difficulté demeure et demeurera toujours : le cinéma des années présentes et futures met en évidence la nécessité d’un régime de classification qui s’adapte aux changements de moeurs et de mentalités, correspondant à une époque définie, dans un lieu déterminé.
La classification des films sera toujours le résultat du regard porté par la société des adultes sur les jeunes et ce regard qui traduit aussi une inquiétude,évolue. Les pouvoirs publics doivent y prêter la plus grande attention mais ne pas se laisser enfermer dans des débats stériles.
C’est en tout cas dans cet esprit que les propositions du présent rapport ont été conçues. J’ai pu mesurer dans les contacts que j’ai eus avec mes interlocuteurs que cette attitude était très largement partagée, au-delà de divergences qui font d’ailleurs la richesse des débats de la commission de classification. C’est la raison pour laquelle les modifications soumises dans le présent rapport à l’examen de la ministre de la culture et de la communication visent davantage à une adaptation qu’à une transformation des conditions d’accès des mineurs aux salles de cinéma. Le sens de ces propositions est avant tout de redonner à l’ensemble formé par l’administration et son juge un meilleur équilibre en vue d’une application de la règle de droit plus stable, plus claire et plus lisible.