Arièle Bonzon “Incertitudes” Yves Rozet “Figures déliées sur un fond sans fond”

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    Ariele Bonzon
    Arièle Bonzon

    Arièle Bonzon • Incertitudes, 2010-2013
    Même si je ne photographie qu’une infime partie de ce que je vois, la photographie est en moi comme une épine, la part visible de ce qui n’est pas certain.
    L’adjectif certain, certaine est apparu il y a dix siècles environ.
    Bien avant la photographie, il faut le souligner.
    Dans le latin populaire certanus et l’ancien provençal certan, quelque chose se montrait qui était sûr, sincère. De même le latin classique certus, issu de cernere (pour discerner), offrait sans tergiverser le pouvoir de décider ce qui était sûr et fixé.
    Nous étions alors face au convaincu, à l’assuré, à l’indéniable, au bien établi.
    Notons qu’il fallut un siècle à l’adjectif incertain, de incertus et incertum, pour faire état de ce qui n’était ni précis, ni sûr, ni fixé…
    Ce dont le résultat est douteux, dont la nature n’est pas nette, d’un siècle à l’autre va se répandre et s’appliquer à ceux qui se trouvent dans l’ignorance au sujet de quelque chose, ou qui, par tempérament, manquent de détermination.
    Il faut en convenir, du certain naquit l’incertain.
    La certitude, du latin certitudo, a très naturellement le caractère de ce qui est sûr et, nageant dans les eaux claires de la conviction, elle apparaît comme objective puis devient subjective pour former, en toute fin de XVe siècle, l’incertitude…
    Nous voici désormais confrontés à ce qui n’est pas assuré, à ce qui est imprévisible, à mille choses incertaines et mal connues.
    Car l’incertitude est grande lorsqu’elle désigne l’état d’une personne qui doute.
    Ainsi allons-nous de la certitude vers l’incertitude.
    Mais il fallut encore attendre quatre siècles pour que certitude et incertitude soient réunies par l’invention de la photographie ! Véritable tour de passe-passe ou acte de pure magie, on n’eut pas le temps de l’établir.
    Un siècle encore et le monde devint quantique. Un certain Heisenberg énonçait en physique un principe dit d’incertitude ou d’indétermination, et c’est toute notre compréhension du monde, issue de la logique d’Aristote, qui volait en éclats.
    Maintenant (mot fait pour durer plus que l’instant, comme une photographie…), où regardons-nous, que comprenons-nous de ce qui arrive et de ce qui disparaît ? Maintenant, que maintenir ?
    La photographie, ce que je vois du monde et le monde lui-même ont ceci en commun, l’incertitude et ses nombreux états.
    Arièle Bonzon, octobre 2012. Ensemble de photographies inédites / 2010 à 2013. Arièle Bonzon, octobre 2012

    Yves-Rozet
    Yves Rozet

    Yves Rozet  Figures déliées sur un fond sans fond, 2002-2010
    Les ensembles présentés ici font partie de la série «Figures déliées sur un fond sans fond», élaborée depuis 2002. Aujourd’hui, ces images inédites finalisent le projet.
    Comment ne pas se référer au dispositif du labyrinthe composé de trajectoires complexes lorsque l’on se promène parmi les multiples fragments de réel, vestiges d’une mémoire, témoignages d’une culture, strates de temps divers formant la matière des propositions apparemment hétéroclites des “Figures déliées…”
    Réel et fiction, en se mêlant, “conspirent” à nous égarer, à perdre notre regard, à éclater nos repères spatio-temporels en créant des fictions suspendues, des prétextes d’histoires à inventer, des sources de songerie.

    Ces images en noir et blanc et en couleur s’organisent en constellation : une écriture en mosaïque qui peut désorienter.
    Le “blanc” de l’intervalle entre les images agit comme lieu de passage entre ces fragments qui ne se complètent pas, entre ces puzzles impossibles où rien ne semble s’imbriquer, avec la volonté de ne pas livrer une image unique qui serait censée contenir la totalité d’une expérience.
    Au contraire, les images “lancent le désir au-delà de ce qu’elles donnent à voir”, et ainsi prennent en compte et jouent avec ce que la logique de l’image unique exclut.
    La présentation des 26 “ Figures déliées sur un fond sans fond” en maquette (30 x 40 cm) montre que l’ensemble des agencements d’images propose de nouveaux détours à son tracé et laisse apparaître un propos intime, secret et fragile qui peut s’estomper à tout moment. Yves Rozet

    • Exposition du19 janvier au 27 avril 2013
    • Vernissage le samedi 19 janvier 2013

    Galerie Le Réverbère