Ange Leccia, né en 1952 à Minerviu en Corse, vit et travaille à Paris et en Corse. Depuis les années 1970, il fait appel au cinéma expérimental, à la vidéo et à l’installation, dans chacune de ses œuvres. Vidéos, photographies et installations, l’exposition personnelle et inédite d’Ange Leccia “Une communauté d’images” invite le spectateur à s’immerger dans un monde d’images afin de vivre une expérience onirique et émotionnelle et d’oublier le temps de la visite, la vie extérieure.
Issues des archives de l’artiste, les images communiquent, échangent, résonnent en même temps qu’elles s’opposent, créant ainsi ce que Ange Leccia nomme « une communauté d’images ». Avec une composante commune essentielle, celle de jouer sur la répétition. Les installations vidéos d’Ange Leccia font appel à des plans montés en boucle où les images, répétées à l’infini, prennent la forme de leitmotivs entêtants, presque hypnotiques qui font vivre au visiteur une expérience inédite. Violence et poésie s’alternent alors, faisant ainsi dialoguer ce tissu d’images.
Extrait de l’entretien mené avec Ange Leccia et conduit par Emmanuel Cuisinier, Commissaire de l’exposition
Comment définiriez-vous le titre « La communauté des images » ?Ange Leccia :
D’abord il y a la question du public et pour lire ces images, il faut la présence d’un regardeur pour que l’œuvre existe, dans un désir de s’ouvrir vers les autres. Ensuite, la proposition que je fais pour cette exposition, prend en compte tout un ensemble de territoires différents que j’ai pu filmer ou qui font partie de ma banque de données, de mes archives avec des images qui datent de l’époque de la Villa Médicis, peuplées de personnages fantomatiques puis d’autres encore, en rapport à « La mer ». Je suis actuellement en train de faire un montage d’images que j’ai tournées au Moyen-Orient cette fois, et que je qualifierais de plus « politiques ». Ces images viennent se confronter à d’autres plus esthétiques créant ainsi cette communauté. Cette exposition devient le point de convergence permettant tantôt la cohabitation, le mélange, tantôt la confrontation, la dualité de propos mis en commun.
L’ouverture de cette exposition plonge d’emblée le spectateur dans un univers composé d’images vidéos pour se poursuivre ensuite par des installations. Quelles atmosphères souhaitez-vous mettre en place au fil du parcours ?
Ange Leccia : Je souhaite que lorsqu’on pénètre dans les espaces d’exposition, que le spectateur ressente la notion d’immersion en créant une véritable césure avec l’extérieur. L’idée ici est de plonger dans une sorte de rêve, et se trouver dans la pénombre face à un voyage fait d’images. C’est aussi pour cette raison que j’ai choisi de ne pas avoir de pièces en volumes qui auraient demandé davantage d’éclairage. En poursuivant l’idée de communauté d’images, il y a ensuite des images avec un statut fixe comme la photographie ou encore des images mentales comme « La colonne de films » où le spectateur n’a accès au « Mépris » que par la musique si caractéristique de l’œuvre cinématographique. Les images sont ici rejouées dans la tête du spectateur qui expérimente le pouvoir évocateur des objets.
Le soir du vernissage, vous présentez « La déraison du Louvre», une déambulation contemplative d’une visiteuse solitaire. Pouvez-vous nous présenter cette vidéo ?
Ange Leccia : C’est une visite du Louvre que j’ai voulue éloignée du point de vue de l’historien ou du spécialiste de l’art. Il s’agirait d’avantage d’une visite qui se place du côté sensible et subjectif, partageant cette expérience où, face à ces tableaux, je me suis mis à dialoguer avec eux presque comme s’il s’agissait d’êtres vivants. Par le biais de la caméra, j’avais la possibilité de faire un focus sur certains visages et cette façon de les filmer par le biais de cette fenêtre, créait une intimité particulière et permettait cette conversation. Ensuite cette visiteuse que l’on découvre devient elle-même modèle : par son visage, se créé une sorte d’osmose avec certains visages de la peinture primitive italienne qu’elle contemple. Cette coïncidence m’intéressait.
Le Centre des arts développe depuis ses débuts une politique éditoriale proposant ainsi à chaque artiste de prolonger l’exposition par un livre. De quoi sera fait ce nouveau propos ?
Ange Leccia : Ce livre appartient lui aussi à cette notion de communauté d’images dont le principe, au-delà du fait d’être également une petite exposition, est de rassembler ces images en un cahier commun de la même manière qu’on battrait les cartes puis les mélangeait. En parallèle du texte de Fabien Danesi, historien de l’art, il y a également cet abécédaire dont les lettres viennent ici établir un répertoire de ma pratique artistique, des évocations, des thèmes ou des émotions. Le but de cet égrainage, permet de faire se superposer des souvenirs personnels, anecdotes et problématiques de travail, une sorte de cahier d’humeur.
Soirée Cinéma le 28 février 2018 avec la projection du film NUIT BLEUE
Réalisé par l’artiste corse Ange Leccia, Nuit bleue raconte l’histoire d’une jeune femme, Antonia, qui revient sur son île natale, à la suite de la disparition en mer de l’un des siens. Elle est ballotée entre son ancien amour Ettore et Alexandre, un jeune homme mutique et lumineux. Cet ancrage dans le milieu masculin du nationalisme armé est le prétexte à une dérive dans les paysages du Cap Corse qui devient un personnage à part entière.
NUIT BLEUE, 2011
de – Ange Luccia durée – 86 minutes avec – Cécile Cassel, François Vincentelli, Alexandre Leccia
Entrée libre sur réservation
Ange Leccia : Une communauté d’images
Exposition du du 19 janvier au 15 avril 2018
Centre des Arts d’Enghien-les-Bains
12-16, rue de la Libération
95880 Enghien-les-Bains
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