André Courrèges, fondateur de la maison du même nom, est à l’origine d’une mode fonctionnelle, architecturée, symbole de son époque qui inspirera de nombreux stylistes par ses formes géométriques et l’omniprésence du blanc.
Après des études de génie civil, il découvre et se passionne pour le dessin et l’architecture et suit des cours à l’École de la chambre syndicale de la couture parisienne. Après avoir travaillé dix ans chez Balenciaga, apprenant une chose chaque jour durant les cinq premières années et s’ennuyant durant les cinq suivantes comme il le confie alors, il quitte la maison de haute couture accompagné de sa femme Coqueline Barrière, cette dernière expliquant :
André et moi avions besoin de nous éloigner de l’influence de notre mentor, Balenciaga. L’objectif était de garder sa philosophie et son raisonnement mais de l’adapter dans quelque chose qui pouvait être accessible à la nouvelle et jeune génération.
À son départ de Balenciaga, André Courrèges se donne cinq ans pour réussir, il y arrivera en deux. Au sein de son entreprise fondée en 1961,les vêtements sont construits,et bâtis, témoignant de sa passion pour l’architecture. André Courrèges aime les jeunes et cherche à libérer la femme : Adieu guêpière, soutien-gorge talons hauts… Place aux combi-shorts, tailleurs à larges poches, pantalons, pantacourts et bottes plates…”Le vêtement doit échapper aux conventions”, jugeait le couturier, pour qui la mode n’était “pas un modèle mais un mode de vie”. Pressentant les bouleversements à venir de la société à la veille de 1968, il a compris très tôt que les femmes ne sont plus cantonnées au rôle d’épouse : elles conduisent et gagnent leur vie, il leur dessine des bottines plates pour se remettre en position de marche !
Styliste anticonformiste, il impose la minijupe et contribue à introduire dans la mode le vinyle et un blanc omniprésent, ses matières et couleur fétiches. Chapeau sur la tête pour grandir la silhouette, le vêtement est arrimé aux épaules, le pied et la jambe sont couverts jusqu’à mi-mollet d’une botte ou d’une chaussette.
“En utilisant les épaules comme point d’appui, je faisais ainsi décoller le vêtement du corps”, disait-il.
Courrèges est aussi l’inventeur du collant “seconde peau” fait d’une seule pièce, allant des pieds aux bras, à glisser sous des robes chasubles ou à porter avec des blousons en vinyle. Sans oublier les célèbres lunettes blanches rondes à fentes horizontales. La « petite robe blanche » de Courrèges deviendra emblématique, telle la petite robe noire de Coco Chanel. En parlant des premières réalisations de Courrèges, Yves Saint Laurent dira que :
« Sa collection est apparue comme une bombe, après, plus rien n’était comme avant ».
Les magazines féminins titrent alors que le couturier a « retiré dix ans aux femmes ».
S’en suivent des expérimentations avec des matériaux novateurs comme le PVC ou le Rhodoïd, et des teintes explosives comme le rouge et l’orangé vifs. Les jeunes femmes font honneur à son inventivité : il compte rapidement parmi ses fans des figures telles que Françoise Hardy, Twiggy, Mireille Darc, Catherine Deneuve, Romy Schneider, Brigitte Bardot, et devient à la fois icône et accompagnateur de la révolution féminine.
Outre les stars du cinéma et de la chanson, il habille aussi les femmes de présidents et les femmes politiques, de Jackie Kennedy à Claude Pompidou et Edith Cresson.
Adulé par les hautes sphères de la mode comme par la rue, le créateur se voit rapidement copié, et se referme de plus en plus sur lui-même, et à l’apogée de son succès, en 1966 et 1967, André Courrèges décide de ne plus défiler. Il va jusqu’à fermer sa maison pour mettre au point sa “couture future”, de la couture accessible à toutes grâce à une fabrication en série, début du prêt-à-porter.
“Toute sa vie, André Courrèges, avec Coqueline, n’a cessé d’avancer, d’inventer pour toujours devancer : un créateur visionnaire qui voyait déjà ce que serait le 21e siècle et qui croyait dans le progrès. C’est ce qui rend si moderne Courrèges aujourd’hui”, ont déclaré Frédéric Torloting et Jacques Bungert, les co-présidents du groupe Courrèges.
André Courrèges se consacra à de nombreux autres projets, comme la peinture, la sculpture ou les véhicules non polluants avec sa filiale Courrèges Énergie. Il laisse derrière lui une petite révolution stylistique et sociale. Pionnier dans l’adaptation des vêtements à l’évolution des mœurs, André Courrèges a toujours regardé vers l’avenir, tout en restant en phase avec son époque.
Les lignes pures et architecturées de ses vêtements reflétaient l’esprit du temps et en marquaient l’époque en insufflant un vent de jeunesse et de futurisme en vogue. Architecte du vêtement autant que couturier, « Le Corbusier de la haute couture», comme il était surnommé, vient de s’éteindre en ce début 2016.
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