“montrer qu’on peut créer sans aller contre le bon fonctionnement de la ville. Ici on vient créer notre support qui est éphémère. Le Cellograff c’est à la fois conceptuel et consensuel” explique l’artiste.
Tout le monde connaît le cellophane, et de nombreuses personnes y ont recours pour emballer leurs restes alimentaires. Par contre, le CelloGraff commence juste à faire parler de lui. A son origine, deux artistes, Astro & Kanos, qui, en 2009 proposent un nouveau concept qui consiste à graffer sur des surfaces de cellophane, support inhabituel pour des œuvres d’art aussi originales qu’éphémères.
C’est Kanos qui en a eu l’idée alors qu’il était étudiant aux Beaux-Arts en 2006. Sa préoccupation majeure se situant au cœur de la ville, sa technique de graffiti lui permet d’exister, d’être présent partout sans en déranger la vie et le rythme. Le graff lui permet de cette manière de :
« Ça fait longtemps que la frustration a disparu. Ça fait partie du concept : le cellograff, c’est un concert, une performance à chaque fois unique. »
Astro & Kanos graffent donc à quatre mains sur des supports créés de toutes pièces grâce un rouleau de 300 mètres de cellophane, leurs œuvres ne restant pas sur les murs mais s’envolant comme par magie, ne laissant leur empreinte que sur le web à travers photos et vidéos. Mais comme le précise Kanos :
Simple en apparence, pratiquer le CelloGraff implique bien des contraintes, celle de sa fluidité qui le rend particulièrement sensible au vent et son étanchéité qui le laisse propice aux coulures.
« Un graffeur pro ne mettra pas longtemps à s’adapter, rassure Kanos. Et il y a de gros avantages : la transparence permet de nouveaux jeux graphiques. On peut peindre partout, dans des endroits où il n’y a jamais de graff comme le pied de la Tour Eiffel, et surtout on agit sans aller contre le fonctionnement de la ville ».
Les CelloGraffs des deux artistes emballent curieux et visiteurs qui ne cessent de les encourager à continuer, saluant la démarche pacifiste de ce nouveau street art.
« On graffe sans embêter et sans être embêté, se réjouit Kanos. C’est peut-être consensuel mais ça permet aux jeunes d’apprendre à graffer sans avoir à payer d’amende ni finir derrière les barreaux ».
Astro et Kanos colorent ainsi les principaux festivals de street art partout dans le monde et travaillent actuellement à faire évoluer leur technique pour toujours aller plus loin, réfléchissant à de nouvelles manières d’exploiter le cellograff, comme à Fontenay-sous-bois où ils ont expérimenté une structure jouant sur l’espace et des effets 3D.
« Le reproche que je pourrais faire au cellograff, c’est qu’on oublie la création pour se concentrer à 100 % sur le format et le support, concède Claude Kunetz, directeur de la galerie WallWorks, dans le 10e arrondissement de Paris. Mais Astro et Kanos en sont conscients, et eux-mêmes espèrent qu’on parlera bientôt plus du graff et moins du cellophane ».
Les deux graffeurs sont confiants :
“On verra ce que ça donnera avec le temps. Chacun utilise son écriture personnelle, quel que soit le support. C’est pareil avec le cellograff” (…)”Le “cellograff” est au graff ce qu’est le live pour un CD” ajoutent-ils.
A leur manière, Astro et Kanos participent à un phénomène de muséification du street art. Les graffs sont passés des rues aux galeries, remettant en cause la nature même de cet art.
« C’est un débat insoluble. On en parle tout le temps entre artistes et personne n’est jamais d’accord, avoue Kanos. Je pense que l’art de la rue ne sera jamais l’art des galeries, et vice versa, mais qu’on peut établir des passerelles entre eux. Ce qu’on a fait avec l’installation à Fontenay-sous-Bois, c’était plus de l’art finalement. Le street art à proprement parler ne peut pas être hors des rues : c’est sa nature même »
Une bien jolie technique qui en met plein les yeux et dont la magie de la réalisation revêt un caractère inoubliable.
Crédits photos : cellograph.com