Moh! Kouyaté “Mokhôya“, un pont entre l’Afrique natale, l’Europe et les États-Unis !
Moh! Kouyaté nous revient accompagné de Gabi Hartmann dans un duo magnifique et tout en sensibilité et nous dévoile ainsi “Tanoun“, un nouvel extrait de son futur album acoustique à paraitre.
“Tanoun” est un texte fort qui dénonce le mariage forcé entre une jeune fille et un vieil homme. Après avoir revisité le répertoire traditionnel guinéen sur son précédent album, Guinea Music All Stars, en modernisant quelques standards des grands orchestres de Conakry, Moh! est allé à l’essentiel sur ce nouveau disque, composé en mode intimiste et en formule quartet, entouré d’un All Stars des cordes acoustiques (le korafola Sefoudi Kouyaté et le violoncelliste Olivier Koundouno) et du trompettiste Camille Passeri. « Cela faisait longtemps que je voulais réaliser un album acoustique, les confinements m’en ont donné l’occasion en me permettant de revenir à l’essence de la musique et d’être à contrepied des surproductions actuelles. »
Mokhôya
L’humanité pour seul horizon
Mokhôya ? Humanisme en malinké. Un appel à plus de fraternité et de solidarité en ces temps troublés. Dans Kankélen, Moh! le magnanime invite ses contemporains à « s’entre-aimer » plutôt qu’à s’entre-déchirer. À ses yeux, la vie est « une traversée qui demande courage, force mentale et dignité », rappelle-t-il dans Douniatégo. « Il faut apprendre l’humanité », exhorte Djeli. Moh!, descendant d’une dynastie de griots, dans Siiya, un hommage aux gardiens de la tradition.
À l’occasion, Moh! chronique la société africaine d’un regard acéré comme lorsqu’il dénonce le mariage forcé entre un grand-père et une fillette dans Tanoun, convoquant les choeurs tribaux et une trompette jazz digressive. Place à Kouyaté le caustique dans l’hypnotique complainte N’Khafo, moquant les dialogues de sourds : « Parler au têtu ? Tu perds ton temps, il n’entendra que par le voir », déplore-t-il. Pour l’illustrer, il dépoussière le blues à papa en mariant les ocres africains à la note bleue, les shuffles du Deep South américain aux transes du désert. Mieux, sur l’instrumental Tara, la kora croise le fer et le nylon avec la six-cordes et taquine la gamme pentatonique, rappelant si besoin était que l’Afrique est terre et mère de blues. Seul morceau chanté en français, Toi et Moi décrit la douleur de l’exil à travers un couple séparé par des « contrées immenses ». Ils vont « errer, rêver » pour abolir les distances. Double sens : « En filigrane, cette chanson traite de la situation intolérable des sans-papiers en France, que l’on jette sur les trottoirs. Comment expliquer toutes ces constructions alors que beaucoup dorment dehors ? »
Less is more. Si l’atypique artiste avait revisité le répertoire traditionnel guinéen sur son précédent album, Guinea Music All Stars, en modernisant quelques standards des grands orchestres de Conakry, il est allé à l’essentiel sur ce nouveau disque, composé en mode intimiste et en formule quartet, entouré d’un All Stars des cordes acoustiques (le korafola Sefoudi Kouyaté et le violoncelliste Olivier Koundouno) et du trompettiste Camille Passeri.
Mokhôya est tout à la fois un retour aux sources ouest-africaines et un jeu de saute-frontière. « Le mélange est mon ADN. » Ce pont entre l’Afrique natale, l’Europe et les États-Unis, ses terres d’adoption, Moh! l’érige, ou plutôt l’arpège, en cordes sensibles et en souffles chauds de trompette. Ballades boisées sur caresses de cello et de cuivre (Faloufema) pour évoquer l’âme soeur, ou à l’unisson de la kora sur Miyabélé (reprise d’un titre du trop méconnu Bah Sadio, chanteur peuhl guinéen décédé en France dans les années 70), Moh! vogue, slow tempo, sur les rives du Niger, au gré des embouchures et sans destination précise. Un manifeste nomade pour en finir avec les no man’s land
EXPLICATIONS TEXTES
▪ Douniatégo (Passage sur terre) : C’est la traversée de la vie, avec tout ce qu’on peut apprendre, voir, subir, vivre. Il nous faut du courage, de la force mentale et de la dignité.
▪ Faloufema (Reste près de moi) : Reste près de moi, ne me quitte pas. Pour rien au monde je ne te laisserai. Ne me précède pas.
▪ Kankélen (Ensemble) : Pourquoi tant de méchanceté, de haine et de jalousie alors que nous ignorons le temps que nous avons à vivre ? On ferait mieux de s’entre aimer. Avec courage et amour nous illuminons nos vies.
▪ Mokhôya (Humanisme) : L’homme a des capacités incroyables. Aussi, même s’il ne les utilise pas à bon escient, il faut lui faire confiance car il est capable de plus extraordinaire.
▪ N’Khafo (J’ai dit) : Parler au têtu ?… Tu perds ton temps, il n’entendra que par « le voir ».
▪ Siiya (Ce que nous sommes) : Je suis Djeli. Ma famille est Djeli depuis plusieurs générations. A l’instar des autres castes, ils ont joué des rôles importants dans la société africaine (l’histoire, l’équilibre, l’émancipation…)
▪ Tanoun (grand-père) : Une jeune fille dénonce un mariage forcé avec un vieil homme. Je ne veux pas de cette union. Non ! Ce ne serait que des regrets.
▪ Wodimbo (Mon voeu) : Ta présence avec moi vaut plus que tout. L’idée que je ne sois avec personne d’autre que toi m’apparait merveilleux.
▪ Tara (Il est parti)
▪ Miyabélé : Ancienne chanson dont je ne connais pas l’origine, interprétée par Bah Sadio, chanteur peuhl guinéen décédé en France dans les années 70. Je n’ai pas identifié la langue dans laquelle elle est chantée…
A suivre :
- Moh! en concert en co-plateau avec Boubacar Traore – dans le cadre du Festival Africolor – au theatre gerard philippe le jeudi 21 decembre à 20h.
- MOKHÔYA Disponible le 1er Décembre 2023 chez Roy Music
- Gabi Hartmann le lundi 27/11/2023 à 20:00 à LA CIGALE
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