Mettant en abîme la situation insulaire de la Fondation Carmignac à Porquerolles, l’exposition L’île intérieure, imaginée par Jean-Marie Gallais, explore un moteur essentiel de la création !
“Dans L’île intérieure, le trouble gagne dès les premiers pas, est-on à Porquerolles ou sur une île qui lui ressemble ?” Charles Carmignac
L’île intérieure, question à Jean-Marie Gallais :
Comment est née l’idée de cette exposition ? Jean-Marie Gallais :
Le point de départ, c’est l’île, et la question : quelle exposition peut-on faire ici, que l’on ne pourrait pas vraiment faire ailleurs ? La liberté du thème vient de l’insularité : espace à part, une île permet d’inventer d’autres réalités, d’autres mondes, elle ouvre l’imaginaire. Ce point de départ vient aussi de la spécificité de Porquerolles, qui accueille un grand nombre de touristes chaque été, au point de menacer son équilibre. La Villa Carmignac attire certains d’entre eux, et l’enjeu était de faire une exposition d’art contemporain très ouverte qui puisse embarquer le visiteur qui ne sait pas exactement ce qu’il va trouver, dans une aventure dont il est le héros en quelque sorte. Cependant, rien d’héroïque dans tout cela : une confrontation au pouvoir des œuvres d’art, pouvoir d’évocation et d’imagination, de réflexion, d’émotion. Cela « prend » ou ne prend pas, mais j’ai essayé de penser à une exposition que j’aurais aimé trouver par hasard, un jour en voyage. La question de l’île a été importante, donc, mais assez peu sur le plan iconographique, plutôt soit sur un plan psychologique (quel artiste est parti vivre sur une île et pourquoi, par exemple), et surtout sur un plan métaphorique, qui ne limitait pas le corpus. Car l’île est l’image par excellence d’un espace autonome, régi par d’autres lois, qu’elles soient scientifiques ou politiques : comme l’œuvre d’art, qui se détache du réel et ouvre tous le champ des possibles (ainsi de la Voix intérieure de Rodin qui nous accueille dès l’ouverture est l’une des premières œuvres de l’artiste qu’il déclare achevée alors que les bras manquent à la figure.) C’est dans ce sens qu’est conçue « l’île intérieure » : un espace que chacun pourra configurer en fonction de sa sensibilité ou de son histoire, avec le secret espoir qu’il agisse même inconsciemment ou à retardement. Je crois en cette petite phrase du grand artiste coréen Lee Ufan, à propos de Cézanne, qui déclare que « si regarder une peinture peut nous faire voir la réalité autrement, alors c’est un événement incroyablement poétique. »
L’île intérieure
Si l’art contemporain n’a jamais été aussi politique et en prise avec le monde, tout un pan de la création, la peinture en particulier, semble s’en détacher pour offrir de vertigineuses plongées dans des mondes intérieurs et des replis. Que signifie cet écart du réel aujourd’hui ? Jusqu’ au 5 novembre 2023, plus de 80 œuvres d’une cinquantaine d’artistes, en provenance de collections publiques, privées, de la collection Carmignac mais aussi des productions dessinent les contours en pointillés d’une île intérieure dont chaque visiteur comblera les manques à sa façon. De Peter Doig à Anna-Eva Bergman, d’Ali Cherri à Auguste Rodin, l’exposition propose de confronter les visiteurs à ces mondes flottants hors des géographies et des temporalités connues.
Des archipels se créeront dans l’exposition comme avec l’installation sculptée par des termites d’Agnieszka Kurant sous le plafond d’eau de la Villa Carmignac. D’étranges présences, humaines, animales, hybrides ou surnaturelles, peupleront les lieux à travers les peintures d’Andrew Cranston ou Verne Dawson mais aussi les sculptures de Francis Uprichard ou Corentin Grossmann dans les jardins. Il faudra s’abandonner, vertiges et basculements nous guettent dans les univers solaires ou crépusculaires de Harold Ancart, Marcella Barceló, Tursic & Mille ou Christine Safa. Si une île fictive, mentale et abstraite se dessine, l’île réelle, méditerranéenne, vient se rappeler régulièrement à nous avec des œuvres créées à Porquerolles il y a plus d’un siècle (Jean-Francis Auburtin, Henri-Edmond Cross), quelques années (Bernard Pesce, Bernard Plossu) ou quelques jours avant l’ouverture (Darren Almond ou Jennifer Douzenel). Ce sont l’énergie de l’île, sa temporalité suspendue, sa fragilité qui font naître ces dialogues avec des œuvres à la poésie contagieuse, qui invitent à changer d’échelle et à s’interroger sur le geste créateur et sa portée aujourd’hui.
L’ÎLE, LA NUIT, LA LUNE
C’est à la tombée de la nuit que l’île se réveille et se révèle… La Villa Carmignac s’ouvre au public en soirée les jeudis du 06 juillet au 31 août et propose d’explorer les liens intimes qui la relient à ce territoire insulaire. Cette année, une soirée entière sera dédiée à la lune à travers la découverte de l’exposition jusqu’à minuit, la visite des jardins à la lampe torche au son de performances musicales… L’imaginaire sera convoqué par le biais de projections de cinéma en plein air ou de promenades sensorielles guidées par les voix de Patti Smith et Charlotte Gainsbourg…
LES VISITES GUIDÉES
Cette saison, des visites guidées sont proposées chaque jour à 10h30 et à 15h dans les espaces d’exposition. Des visites guidées personnalisées, en français, anglais ou italien, sont également possibles dans le cadre d’événement privés ou professionnels.
▶ ÉVÈNEMENTS PAYANTS ET SUR RÉSERVATION VILLACARMIGNAC.COM
Située dans le département du Var en région Provence-Alpes-Côte d’Azur, l’île de Porquerolles, longue de 7km et large de 3km, fait partie de la commune d’Hyères et du Parc national de Port-Cros. lle est accessible en bateau depuis la Tour Fondue (15 minutes de traversée). Les visiteurs y circulent à pied ou à vélo. Prévoir des chaussures souples pour visiter les jardins. Les expositions se découvrent pieds nus. Afin d’offrir un contact privilégié avec les œuvres, le nombre de visiteurs est limité à 50 personnes par demi-heure. Les billets donnent accès à l’ensemble des espaces de la Villa Carmignac et aux jardins. Réserver son billet sur le site villacarmignac.com
Villa Carmignac
Île de Porquerolles
La Courtade
83400 Hyères
Les artistes :
- Caroline Achaintre
- Etel Adnan
- Darren Almond
- Harold Ancart
- Giulia Andreani
- Lucas Arruda
- Jean-Francis Auburtin
- Marcella Barceló
- Jean-Michel Basquiat
- Anna-Eva Bergman
- Ragna Bley
- Tim Breuer
- Alexander Calder
- Ali Cherri
- Francesco Clemente
- Marcus Cope
- Andrew Cranston
- Henri-Edmond Cross
- Verne Dawson
- Jérémy Demester
- Peter Doig
- Jennifer Douzenel
- Antoine Espinasseau
- Helen Frankenthaler
- Rodney Graham
- Corentin Grossmann
- Simon Hantaï
- Camille Henrot
- David Horvitz
- Cathy Josefowitz
- Pia Krajewski
- Agnieszka Kurant
- Roy Lichtenstein
- Luz Moreno & Anaïs Silvestro
- Jill Mulleady
- Otobong Nkanga
- Albert Oehlen
- Bernard Pesce
- Bernard Plossu
- Sigmar Polke
- Auguste Rodin
- Christine Safa
- Edgar Sarin
- Norbert Schwontkowski
- Kiki Smith
- Léon Spilliaert
- Tursic & Mille
- Francis Upritchard
- Frank Walter
- Christopher Wool
Et les installations pérennes de :
- Miquel Barceló
- Mark Bradford
- Tony Matelli
- Janaina Mello Landini
- Bruce Nauman
- Michel Redolfi
- Adrián Villar Rojas
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